Comment l’Afrique met en place la surveillance de la qualité de l’air
Alors que la pollution atmosphérique devient un enjeu majeur de santé publique à l’échelle mondiale, de plus en plus de villes africaines prennent conscience de l’urgence d’agir. Longtemps absente des priorités politiques, la surveillance de la qualité de l’air s’impose aujourd’hui comme un outil essentiel pour comprendre, anticiper et réduire les risques sanitaires liés aux polluants urbains. Grâce à des dispositifs de mesure innovants et à l’engagement de certains gouvernements, un mouvement émerge sur le continent, offrant des données précieuses sur l’état de l’air que respirent des millions de citoyens.

Quels sont les principaux polluants suivis, leurs effets sur la santé, et les résultats déjà observés dans les grandes métropoles africaines ? Tour d’horizon d’une révolution discrète mais vitale.
La surveillance de la qualité de l’air en Afrique
En Afrique, la surveillance de la qualité de l’air reste rare mais en forte progression dans plusieurs grandes villes. Parmi celles qui disposent de réseaux de mesures en continu ou ou ont réalisé de campagnes de mesure :
- Ghana (Accra et d’autres villes), la surveillance de la pollution de l’air se fait avec de capteurs à bas coût et des stations de référence (sciencedirect.com).
- Sénégal (Dakar) avec des stations fixes et des capteurs embarqués sur véhicules .
- Cameroun (Yaoundé) via déploiement de dispositifs en temps réel sur plus de 200 points (dw.com).
- Afrique du Sud (villes industrielles et thermiques) via réseau national poursuivant les NO₂ et SO₂ (dw.com).
- Angola (Luanda et Abidjan comparé) via étude donnant données de NO₂, O₃, SO₂ (researchgate.net).
Ces villes combinent stations fixes traditionnelles et capteurs à bas coût, satellites, et véhicules connectés, plaçant la surveillance au cœur des politiques urbaines.
Quels sont les polluants mesurés et leurs effets sanitaires ?
La surveillance de la qualité de l’air concerne principalement les paramètres suivants :
- PM₂.₅ et PM₁₀ (particules fines et grossières) : issues du trafic, la biomasse, les industries, les tempêtes de poussière sahélienne. Elles pénètrent profondément dans les poumons et le sang, provoquant maladies respiratoires, cardiovasculaires, cancers, AVC, réduisant l’espérance de vie de 4 à 6 ans en Ghana .
- NO₂ : issu des véhicules et centrales au charbon. À Accra toutes les zones dépassent le seuil OMS annuel de 10 µg/m³, avec disparités socio-économiques marquées (sciencedirect.com).
- O₃ : polluant secondaire formé par réactions sous lumière solaire. Au Ghana et Ghana, les niveaux annuels (72–92 µg/m³) excèdent le seuil OMS de 60 µg/m³ (sciencedirect.com).
- SO₂ : émissions des centrales thermiques et industries. Au Nigeria et en Afrique du Sud, des pics dépassent régulièrement les normes journalières OMS .
Effets : bronchites, exacerbations d’asthme et BPCO, infarctus, AVC, cancers pulmonaires, mortalité prématurée. En Afrique (urbain + intérieur), 1,1 million de décès en 2019 sont liés à la pollution (allafrica.com).
Quels sont les résultats des campagnes de surveillance de la qualité de l’air ?
Au Ghana (Accra et autres)
- PM₂.₅ médian annuel : 50,8–67,9 µg/m³ (norme OMS = 5 µg/m³) (sciencedirect.com).
- O₃ : 72–92 µg/m³ vs seuil 60 µg/m³ .
- NO₂ : 3,65–12,15 µg/m³, souvent >10 µg/m³ (sciencedirect.com).
- Capteurs low-cost validés vs référence : erreur moyenne 4–13 µg/m³ (pubs.acs.org).
- Impacts : vie réduite de 4,5–6,2 ans, 98 % des zones non conformes, effets non-cancérigènes dangereux pour enfants/juniors (sciencedirect.com).
Au Sénégal (Dakar)
- PM₂.₅ et PM₁₀ au-dessus des normes OMS en saison sèche (AQI : orange à rouge), bonne à modérée en saison des pluies (researchgate.net).
- Surveillance mobile sur véhicules Ex. via Atmotrack (blogs.worldbank.org).
Au Cameroun (Yaoundé)
- Réseau de plus de 200 capteurs connectés (GSM) mesurant poussières, NO₂, SO₂ pour décisions politiques et alertes .
En Angola (Luanda comparé)
- NO₂ : de 2,7 ppb (suburbain) à 25 ppb (industriel) (researchgate.net).
- O₃ : ~18–19 ppb.
- SO₂ : max 7,2 ppb, la plupart <1,9 ppb (researchgate.net).
En Afrique du Sud
- Six des dix plus grandes sources mondiales NO₂ identifiées (centrales charbonnières, mines) (dw.com).
- Lieux comme Mpumalanga révèlent d’importants risques NO₂ et SO₂ (pmc.ncbi.nlm.nih.gov).
Une surveillance de la qualité de l’air contribuant à l’urbanisme favorable à la santé
Les campagnes de mesure ont permis :
- L’identification des sources majeures de pollution de l’air : trafic, déchets brûlés, centrales à charbon.
- La Cartographie de l’exposition des populations : ex. Accra révèle inégalités socio-spatiales avec zones à forte pollution (dw.com, pmc.ncbi.nlm.nih.gov).
- Une Communication active et visible via AQI (Dakar, Yaoundé) pour informer populations et pouvoirs publics .
- Des politiques ciblées : renouvellement des bus, interdiction de brûlis, transport électrique au Caire, plan d’action à Addis Abeba, végétalisation à Accra .
Quels sont les impacts de la surveillance de la qualité de l’air ?
🌱 Amélioration des conditions de vie
- Réduction de la morbidité respiratoire et cardiovasculaire.
- Meilleur confort urbain, baisse des symptômes tels que toux, irritations.
- Transparence inspire confiance et action citoyenne (mdpi.com, thinkglobalhealth.org).
🏙️ Urbanisme favorable à la santé
- Végétation urbaine diminue NO₂, régule microclimat (pmc.ncbi.nlm.nih.gov).
- Transports propres (bus électriques, pistes cyclables).
- Réduction des déchets brûlés, rénovation industrielle.
- Zonage autour des écoles et hôpitaux loin des axes pollués.
📊 Surveillance, catalyseur de politiques
Sans données fiables, pas de régulation. Les villes avec surveillance publient des données en temps réel, structurent les plans de nettoyage de l’air et mobilisent l’action publique (thinkglobalhealth.org).
Les villes africaines sont de plus en plus engagées dans la surveillance de la qualité de l’air – Accra, Dakar, Yaoundé, Luanda, Johannesburg entre autres – montrent que mesurer rend visible, compréhensible et réductible la pollution urbaine. En combinant données, communication, interventions urbaines et politiques publiques, ces villes tracent la voie vers un environnement urbain réellement tourné vers la santé. Un modèle encourageant, à étendre à l’ensemble du continent.
Le bureau d’étude du Laboratoire d’Analyse Chimique du Cameroun propose d’accompagner les collectivités sur les questions d’Etudes d’Impact sur la Santé (EIS) et d’Urbanisme Favorable à la Santé (UFS) avec la lise en place d’une surveillance de la qualité de l’air pour réduire la pollution et améliorer la santé des populations.
Crédit photo de Denis Kashentsov sur Unsplash